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Mosaïques

dans : 2009

Mosaïques (2009-2010)
5 Femmes, France.
Collections du Centre National de Arts Plastiques (CNAP) – 15 photographies et 5 bandes son d’entretiens, Master DVD, Ipods shuffle, casques, CD texte

Un regard sur 5 femmes vivant l’expérience de la mixité, à Orléans et Marseille. Commande publique pour la réalisation d’œuvres photographiques dans le cadre du projet Mosaïque. Ces œuvres ont intégré la collection de photographies du Fonds national d’art contemporain. Le thème du projet est le suivant : « les signes de l’appartenance à une double culture ».

 

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Mosaïques (de la série), 2010, Cprint, 147×147 cm, édition de 4, Collections du CNAP

 

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(…) Je regarde déjà autrement cette image où ma mère danse sur sa terrasse à Marseille. Encapuchonnée, avec le style ‘beurette‘ qu’elle a voulu me prêter pour ma commande sur la diversité culturelle. Filmer et photographier ma mère, c’était répondre à une demande non avouée : lui redonner raison, lui redonner son statut de femme, fixer son combat sur la pellicule. Non mon fils, tu n’es pas un traître. Tu es né des deux côtés, c’est tout … Maintenant les mains levées vers le ciel de Marseille – elle efface sa vie – Solange, les mains en équilibre qui soupèsent mes deux cultures, nos deux vies, là-bas et ici. L’une touche la grande barre d’immeuble et l’autre est au- dessus du bout du Massif de Saint Cyr. Elle fait le voyage à l’envers, elle refait sa vie, le ciel est dans la mer et la terrasse m’évoque un voyage en bateau. Nous sommes sur une passerelle, via Tanger, on chante Nssi Nssi, la radio poussée à fond. Dans l’entretien, elle me fait « le plus beau témoin » de son mariage, j’avais trois ans. Là, elle fait son deuil, tire un trait sur le passé, montre une autre forme de la diversité, elle montre avec conviction, le corps dansant orchestre la scène – que l’espace culturel de demain se construira depuis l’étranger. D’où l’on parlera de « créolisation », parce que la force d’un dialogue venu d’ailleurs échappe aux représentations convenues de la mixité. D’où, le corps dansant de ma mère légère témoigne, bras ouverts, de la passion vécue avec l’homme qu’elle a aimé, Mohamed, né sur l’autre rive de la Méditerranée.
Et puis, elle dira encore dans l’entretien, quelques phrases comme ça « l’intégration, c’était une fausse route », « J’ai bien fait de vous faire», ou encore, « c’est moi qui lui parlait de sa mère ». De la mixité il en faudra toujours, car malgré les souffrances de Solange, il n’en reste pas moins que nous sommes impactés, devant cette photographie, par la formidable liberté de mouvement et d’expression de soi que déclenche la scène.

Alors ma mère qui n’avait jamais vu le Maroc quand elle m’a envoyé par avion pour ce même baptême, comment expliquer cette transformation, quand là, son corps qui écrit avec la lumière une forme d’arabesque subjective, tel l’oracle, nous renvoie en contre jour la puissance d’un « discours » sur l’origine du monde ? Pourquoi ce geste en forme d’offrande ? Qui plus est, quand elle ouvre ses bras comme ça, elle arrive à fabriquer une autre image. Une image ainsi partagée dé matérialise complètement nos structures de pensée. Et c’est bien la question que pose un regard contemporain sur nos diversités, sur nos échanges culturels … La diversité comme objet du désir. Pour une approche culturelle des cultures.

Malik Nejmi, 2010