L’inquiétante enfanceté, est un cycle d’expositions sur les représentations adultes de l’enfance et ses ambivalences.
La proposition de mettre en place un cycle d’expositions sur ce thème était motivée par une double observation : premièrement du « motif » récurrent, chez les étudiant·e·s de la classe préparatoire artistique, depuis plusieurs promotions, du portrait d’enfant, ou plutôt d’enfance — forme de représentation caractéristique d’un état de passage propre à cet âge et situation transitoire — et d’un nombre important d’œuvres traversant les pratiques contemporaines explorant cet âge de la vie, notamment et en partie découvertes grâce au regard renouvelé et ré-évalué porté aux œuvres d’artistes femmes — sans pour autant faire de l’enfance un poncif lié au féminin.
D’ailleurs, plusieurs expositions, bien en amont ou concomitamment au travail mené avec les artistes pour mettre en place ce cycle à la Transversale, voyaient le jour en France sur l’exploration de cette thématique (de Présumés innocents au CAPC de Bordeaux en 2000, en passant par Enfants, au Centre d’art contemporain de Pontmain à l’automne 2016, jusqu’à Encore un jour banane pour le poisson-rêve au Palais de Tokyo à l’été 2018, etc.), mais c’est bien cette notion d’inquiétude, qui traversait d’ailleurs, sans en dire toujours le nom, l’ensemble de ces expositions — du malaise de la remémoration de ce qui a été pour tous et n’est définitivement plus pour chacun, ce retour d’une période à la fois idéalisée et fantasmée (autre forme d’absence de neutralité des savoirs situés), qui traduit surtout ce qui semble à présent inconcevable, en dehors de la réactivation, de notre positionnement adulte — qu’il était question de faire prévaloir dans ce cycle.
Tatacombe de Marie Hendriks (du 05 décembre 2018 au 25 janvier 2019) a ouvert ce cycle en convoquant, à travers une scénographie narrative et une forte dramaturgie de l’exposition, la mémoire, le regard fantasmé et les angoisses enfantines sur la vieillesse et la mort, tandis que In honored Dust de Delphine Vaute (06 mars au 05 avril 2019), transcrivait à travers une œuvre graphique et picturale la puissance émotionnelle et l’évocation féerique de l’enfance, autour des représentations de corps, indéfinis, confrontés à celui de l’animalité, de leur potentiel de transformation et d’hybridation, comme du régime obscur de l’imaginaire et de la face sombre et parfois cruelle qui animent aussi l’enfance.
La quatrième est dernière exposition du cycle L’inquiétante enfanceté devrait, en 2020, aborder, non sans humour, l’aspect le plus scatologique du dessin et de l’imaginaire incongru de l’enfant qui choque tant nos conventions sociales adultes, en empruntant à la fois aux graffitis et à la fabrication de fanzines lowcost.
Emmanuel Ygouf