La bulle s’enfle, encre et souffle, encre soufflée…
Encre légère qui vient se déposer sur la feuille blanche, s’y alanguit comme un fruit mûr, s’épanouit en traces imprévues…
Le spectateur, saisi, pense deviner, croit voir, voudrait dire… Il ne parlera jamais que de lui même, sur l’écran noir et blanc de l’image projetée.
L’artiste a cessé de souffler. Il prend le pinceau, la plume… ou le ventilateur. De ce qui doit advenir, il ne sait encore rien. Mais la main est assurée.
La bulle se déclôt, la ligne s’allège ici, se surcharge tout à côté, l’encre se mêle de peinture, s’irise, en métamorphoses légères où apparaît … Quoi ? Faut-il nommer, vraiment ?
Regardez travailler Seba Lallemand: ne croyez pas qu’il est avec vous, il habite seul cet espace singulier de l’œuvre en train de naître, irréfutable.
Vous voudriez intervenir, lui dire que c’est bien, que ça suffit, là, en l’état? Il vous sourit gentiment. Et poursuit son chemin. Il est déjà ailleurs, possédé par ce souffle qui guide sa main, la bulle s’enfle encore, et crève, et se sublime… Jusqu’où ?
Il s’arrête. Range ses outils. « Voilà », dit-il simplement.
Miren Arambourou, Trôo, le 15 février 2015