« Il faut s’attendre que de si grandes nouveautés transforment toute la technique des arts, agissent par-là sur l’invention elle-même, aillent peut-être jusqu’à modifier merveilleusement la notion même de l’art. Sans doute ce ne seront d’abord que la reproduction et la transmission des œuvres qui se verront affectées. On saura transporter ou reconstituer en tout lieu le système de sensations, – ou plus exactement, le système d’excitations, – que dispense en un lieu quelconque un objet ou un événement quelconque.
Les œuvres acquerront une sorte d’ubiquité. Leur présence immédiate ou leur restitution à toute époque obéiront à notre appel. Elles ne seront plus seulement dans elles-mêmes, mais toutes où quelqu’un sera, et quelque appareil. »
Paul Valéry, « La Conquête de l’ubiquité », 1928
« Qu’est-ce que je vous demande ? De concevoir et de réaliser une sculpture qui devra être transportable, qui devra être alternativement cachée et montrée, et qui aura un caractère jaillissant, effervescent… Principe de conception : combinaison de la présence d’un objet quotidien (manufacturé) avec des citations de la sculpture africaine et de la sculpture occidentale. Mode de fabrication : construction et assemblage. Intégrer dans la réalisation l’utilisation des ateliers bois et métaux. Présentation : concevoir et réaliser un conditionnement permettant à la fois le transport et le jeu du cacher/ montrer. Parallèlement : concevoir un « geste » et une « adresse verbale » avec ou face à cette sculpture. »
Jean-Paul Thibeau, conférence-performance, 1992
« Par définition, l’action n’est jamais localisable mais toujours dislocale. Si l’on dit qu’un acteur est acteur-réseau, c’est d’abord pour souligner à quel point l’origine de l’action est source d’incertitude. […] L’action est toujours empruntée, distribuée, suggérée, influencée, dominée, trahie, traduite. Comme Jésus sur la croix, c’est des acteurs que l’on devrait toujours dire : « Pardonne-leur Père, car ils ne savent pas ce qu’ils font » (Luc, 23:24). »
Bruno Latour, 2006
On ne peut parler d’art sans s’intéresser à son enseignement et aux formes pédagogiques sous lesquelles cet enseignement se pratique. Dès lors une série de questions se posent : l’art peut-il véritablement s’enseigner ? Et si oui, que doit-il enseigner et sous quelle pédagogie ? L’art mérite-t-il de faire partie des enseignements publics majeurs, au même titre que les mathématiques, la sociologie, l’histoire ou l’informatique ? Et, si oui, de quel art parle-t-on ? Comment l’étudiant reçoit-il cet enseignement ? Et qu’en faire une fois le diplôme en poche ? Cette salve de questions – capitales – ne peut trouver de pertinence que si, au préalable, une rapide histoire des écoles d’art est esquissée. L’intervention sera complétée par un diaporama projeté simultanément.
Marie-Haude Caraës est directrice de l’École supérieure des beaux-arts de Tours et directrice-adjointe de l’École supérieure des beaux-arts TALM (Tours, Angers, Le Mans) après avoir dirigé le Pôle recherche, expérimentations et éditions de la Cité du design et assuré la direction scientifique de la Biennale international design Saint-Étienne (2007-2014). Elle a notamment co-dirigé avec Philippe Comte des recherches sur l’énergie : Vers un design des flux, La lutte contre la précarité énergétique, Le design d’information dans le contexte des smart grids, etc., et travaille actuellement avec Cédric Carles sur une recherche participative Paléo-énergétique. Elle a été le commissaire de l’exposition Les androïdes rêvent-ils de cochons électriques ? (Biennale internationale design Saint-Etienne 2013) et mène, en parallèle, des travaux de recherche personnelle, notamment avec Images de pensée (RMN, 2011) avec Nicole Marchand-Zanartu. Elle est associée au Laboratoire Art et Flux de la Sorbonne et membre du Laboratoire des Intuitions.