À travers une approche d’avantage sensorielle, j’ai approfondi la question de la matière, testé ses limites, afin de l’exploiter au mieux.
Lorsque je travaille, le toucher est une part essentielle de ma démarche.
En effet, je fais plus confiance à mes doigts qu’à mes yeux pour associer les différentes matières entre elles, pour les faire échanger, dialoguer.
Le résultat visuel importe peu sur le moment car il est souvent incohérent et dépourvu d’une esthétique préconçue ; il ne fonctionne pas toujours.
Cette forme finale, déterminée par la matière que j’emploie, est évolutive et proliférante. Elle n’est donc plus une forme contrôlée.

Cependant, une fois la forme hasardeuse apparue, elle est retravaillée, améliorée. Associé au temps, c’est un réel corps-à-corps que j’aime engager avec chaque sculpture à laquelle je donne vie, et qui se déploie en parallèle d’une position plus contrainte pour réaliser les broderies.
Cette nécessaire adaptation du corps à l’œuvre en cours de création est le résultat d’une discipline mise en place lors de ma pratique du judo étant plus jeune.
En effet lors des combats, qu’ils soient debout ou au sol, le corps-à-corps est la première chose notable. Ensuite vient une anticipation des mouvements-attaques de l’autre, la vue servant peu pouvant même parfois desservir ; le ressenti et le toucher, eux, sont primordiaux. La sensibilité du toucher que j’ai pu développer au cours de ces onze années de judo est une sensation que je retrouve lorsque je travaille la terre et qui m’est vitale.

Camille Azéma.