« J’appelle dispositif tout ce qui a, d’une manière ou d’une autre, la capacité de capturer, d’orienter, de déterminer, d’intercepter, de modeler, de contrôler et d’assurer les gestes, les conduites, les opinions et les discours des êtres vivants. Pas seulement les prisons donc, les asiles, le panoptikon, les écoles, la confession, les usines, les disciplines, les mesures juridiques, dont l’articulation avec le pouvoir est en un sens évidente,m ais aussi,le stylo, l’écriture, la littérature, la philosophie, l’agriculture, la cigarette, la navigation, les ordinateurs, les téléphones portables et, pourquoi pas, le langage lui-même »
Agamben, Giorgio, Qu’est ce qu’un dispositif, éditions Payot / Rivages, 2007.
En 2013, à l’origine du projet « Subliminaloops », les œuvres sélectionnées par Nicolas Gaillardon & Sengthe Vanh Bouapha forment un groupe de productions artistiques variées, questionnant l’image, le son, la vidéo et l’installation au travers de dispositifs autonomes et répétitifs. À première vue, les œuvres semblent toutes être réalisées dans une économie de moyens et de matériaux, mettant à l’honneur techniques de bidouillage et récupération d’images. Au delà de cette fausse et apparente simplicité créative, l’exposition est à envisager comme une immense machine(rie) bien construite où chacune des œuvres aurait sa place et correspondrait à un rouage. Chaque rouage participerait au bon fonctionnement de l’ensemble.
La répétitivité des images et des mouvements, générée à partir de différents processus techniques – mécaniques ou technologiques – est, parfois contrôlée, parfois hasardeuse, mais accroche toujours le regard du spectateur et influe directement sur ses sens. La boucle, la rotation, le flux et le reflux, le va-et-vient, etc., ont un caractère hypnotique indiscutable. Dans cette exposition qui peut se rejouer indéfiniment, le rôle du spectateur est aussi très important ; ce dernier sera libre d’établir les liens entre les différentes œuvres. Ces interactions permettront aussi au spectateur de remettre en question sa place, son rôle et son habituelle passivité face aux œuvres. L’exposition, dans son ensemble, propose une réflexion sensible sur la place et le rôle des images et des dispositifs qui remplissent inlassablement le quotidien de l’Homme. De l’information en continu aux pollutions visuelles et sonores ou aux publicités diffusées en boucle, toutes ces tornades médiatiques envahissent notre monde et l’habitent. Cela crée un « mouvement perpétuel » constitué d’images, de discours ou de sons et il est tout à fait naturel que les artistes s’y confrontent, le questionnent et le retranscrivent à leur manière, même inconsciemment.
Baptiste Fabre