Des parties de ce temps sont sans doute saisies, fixées dans les peintures que je vois appuyées contre le mur, le dos tourné. La toile en travail contient un groupe d’objets hissés sur un genre de piédestal, entourés d’eau, d’une mer couleur bleu foncée. Assise sur le même piédestal, une très jeune fille en petite robe couleur nacre scrute l’horizon dans l’attente de quelque chose qui ne se voit pas encore. Quelque chose plus que quelqu’un, me dis-je, car nous sommes ici surtout dans le règne des objets. La fille elle-même peut être le produit de la magie opérée par ces objets insolites, me dis-je encore. Elle leur prête sa vue et scrute pour eux l’horizon bleu foncé.
Mon regard continue son trajet désordonné dans l’atelier transpercé par la lumière rasante venant des fenêtres. Une étagère sur le mur, à droite, groupe une multitude de petits objets cousins des ceux qui apparaissent dans les toiles. Sur eux, la vie est déjà passée, ils peuvent goûter au silence et à l’immobilité de tout ce que la poussière sait si bien couvrir. Ceux qui trônent sur les toiles sont un peu différents, ils irradient de couleur, magnifiques, placés au centre d’un univers qu’ils habitent presque seuls, repères de stabilité dans un monde caduc. Sur la toile en travail, la fillette leur tourne le dos, confiante, fixant le point mystérieux et éloigné. Ils sont sa demeure, son refuge autour duquel tourne toute la voûte céleste.
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