L’étreinte.
Ce qui, d’une œuvre, se montre s’emblée, n’est pas sa signification. Ainsi, l’œuvre de Lydie Arickx – qui arrête et fascine par sa puissance immédiate – ne peut se confondre avec un point de vue sur la condition humaine. De même, l’apparente corruption des chairs et des corps n’est pas la simple monstration d’une déchéance de l’être souffrant sa finitude.
Les corps gravement sollicités, outragés par le réel, sont au contraire «réclamés» par Lydis Arickx dont l’œuvre m’est bientôt apparue comme une étreinte. Une vaste et vigoureuse étreinte du corps d’Autrui et de ses avatars extrêmes. C’est l’excès de cette étreinte absolue qui passera la beauté pour aller au sublime.
Lydie Arickx veut le corps; elle veut le corps d’Autrui. Mort ou vif, elle lui rendra l’âme, elle le réanimera au-delà de toute possibilité «raisonnable». L’homme disjoint, elle le rejoint.
Elle dit de ne pas savoir ou elle va en commençant de peindre. Moi je le sais … elle va droit vers Autrui. En œuvrant ainsi, en cultivant sa propre absence, Lydie lui fait place. Son geste initial, aventuré, immense, suivi de repentirs et de rehauts contraires, feront venir le corps d’Autrui.
C’est ainsi que des manges de l’étreinte créative se dégagera bientôt un thorax, un pubis…; béance de la chair à panser d’urgence, ou à célébrer en l’état…
L’œuvre d’art, selon Nietzsche, est un excès qui ne peut arriver sans ivresse. L’ivresse de Lydie est la plus radicale: c’est la passion d’Autrui.
Alain GILLIS