L’exposition autour du Dépeupleur de Samuel Beckett propose de confronter un texte, une écriture, avec des univers plastiques.
Beckett est un choix qui correspond à une atmosphère générale dont on peut légitimement dire qu’elle souligne toute à la fois notre présent, sa réalité et les fictions qui le traversent.
Incipit du texte : « Séjour où des corps vont cherchant chacun son dépeupleur. Assez vaste pour permettre de chercher en vain. Assez restreint pour que toute fuite soit vaine.»
Dessins, peintures, photographies, vidéos et installations reprennent cet univers de corps à la dérive dans un espace contraint.
Pierre Besson
Pierre Besson a entrepris d’explorer le potentiel narratif de la simple image photographique et de se positionner davantage comme metteur en scène dans son rapport à la production d’images.
Par conséquent, l’artiste appréhende le décor dans sa dimension narrative et se plie aux contraintes (délivrer le maximum d’informations dans un espace restreint) d’un scénario improbable.
La théâtralité dans la photographie ne prend pas ici la peine de détourner le public de ses propres fictions.
Au contraire, elle l’invite à participer à un engagement imaginatif à partir de son propre référentiel.
Alexandra Fau.
Texte extrait de Pierre Besson Inner, Monografik éditions, 2007.
Jérémie Bruand
Jérémie Bruand explore les formes et les matières dans l’élaboration de protocoles rigoureux.
Chacun de ses travaux sont le fruit d’expériences répétitives et d’une observation sensible des réactions qu’il provoque sur des matériaux pauvres et parfois récupérés (papiers fax, papiers abrasifs usagés, briques…).
C’est dans ces actions rationnelles aux processus physiques et mathématiques simples que se composent des œuvres sérielles.
A la fois dans la maîtrise des mécanismes et le désordre accidentel qui en résulte.
Bernard Calet
Le travail de Bernard Calet prend le plus souvent la forme d’installations où sont utilisés différents médiums comme la sculpture, l’image photographique ou vidéo, le son.
Le langage dans sa double fonction, définition et métaphore, est aussi une composante importante de son œuvre.
Les recherches de Bernard Calet portent depuis toujours sur la notion de l’espace et la complexité que la modernité a introduite dans notre relation à celui-ci, autrement dit la perception fusionnelle de ses multiples aspects : architecture, paysage, frontière, endroit de transit ou encore image
cérébrale, point de fuite des flux communicationnels, zone floue de l’imaginaire…
Tous ces « espaces » se (re)présentent en road movies superposés où le réel s’imbrique au fictionnel et vice-versa. Ils nous sont contemporains et, par cela même, insaisissables et incertains.
Pour s’y situer, nous sommes contraints à un état de mobilisation non-stop, physique et mentale, entre un ici et un ailleurs, entre un « déjà» et un « pas encore »*. (…)
Anastassia Makridou-Bretonneau, texte exposition Contexts, Paris
* Voir Giorgio Agamben, Qu’est-ce que le contemporain, éd. Rivages, 2008, p.p 25-32..
Franck Charlet
[…] Lorsque la peinture se manifeste comme telle, c’est-à-dire lorsqu’elle ne sombre pas dans le domaine de la production d’images, elle teste chez le regardeur sa capacité à trouver la bonne distance entre lui et l’œuvre. Cette distance n’est pas une métaphore ; c’est une distance physique réelle. […]
Sammy Engramer
« Ce qui caractérisait l’ancien capitalisme, où régnait la libre concurrence, c’était l’exportation des marchandises. Ce qui caractérise le capitalisme actuel, où règnent les monopoles, c’est l’exportation des capitaux. »
Vladimir Ilitch Lénine.
« Personne, il est vrai, n’a jusqu’à présent déterminé ce que peut le Corps, c’est-à-dire l’expérience n’a enseigné à personne jusqu’à présent ce que, par les seules lois de la Nature considérée en tant seulement que corporelle, le Corps peut faire et ce qu’il ne peut pas faire à moins d’être déterminé par l’Âme. »
Baruch Spinoza.
« Les armoiries agissent « comme des codes sociaux, ayant pour objet la communication révélant deux aspects de ceux qui en font usage : l’identité et la personnalité. »
Michel Pastoureau.
Michel Herreria
« Dessins au trait ou sur carte à gratter, numériques et animés, scénographies, grandes peintures sur papier mais aussi sculptures et environnements : depuis plusieurs années Michel Herreria construit une oeuvre profuse dont la dimension polymorphe n’est pas sans être troublante.
Le trait semble être l’alpha du vocabulaire plastique de l’artiste. Il est souvent rappelé que le dessin et le dessein sont à l’origine un même mot, issu du vocable italien « de-signare » que le français a conservé et transcrit dans le verbe « désigner ». L’acte de définir graphiquement les contours d’une chose et celui de la nommer, de la pointer sont, pour l’étymologie, étroitement liés. L’œuvre de Michel Herreria, et le rôle primordial qu’y joue la pratique graphique, s’accordent en tout cas bien d’une telle définition, tant l’entreprise qui consiste à tenter de circonscrire un certain ordre du monde y est centrale.»(…)
Louise Grislain
Olivier Nottelet
Et tout le tremblement / V. Brocvielle
« Les corps se frôlent avec un bruit de feuilles sèches. Les muqueuses elles-mêmes s’en ressentent. Un baiser rend un son indescriptible. Ceux qui se mêlent encore de copuler n’y arrivent pas. Mais ils ne veulent pas l’admettre. »
Samuel Beckett, Le Dépeupleur, 1970.
Le monde est un cylindre. Le corps est une arène. Mais on ne veut pas l’admettre. Dans Le Dépeupleur, Samuel Beckett décrit avec précision cet endroit peuplé d’humains gesticulants en pure perte. Il s’agit d’un cylindre de cinquante mètres de pourtour à l’intérieur duquel oscillent la température et la lumière. Une caverne à ciel ouvert. Un lieu de séjour où des corps se cherchent en vain et tentent de fuir, en vain.
Olivier Nottellet crée depuis quelques années un monde de cet ordre (peuplé de dépeuplés, vivotant, beckettien). Ses dessins et ses installations forment un vaste cylindre, une carrière, un creuset où couve la catastrophe.
Le péril menace. C’est frappant. Sidérant. Ça a lieu. Ça va venir. C’est imminent.
Et puis non. Le prochain dessin contredit le précédent, il l’empêche d’être le dernier. Des milliers d’encres sur papier cohabitent désormais, elles forment une arche. Des étais de bois sont apparus ça et là. Des remblais, des murs de soutènement. La réserve blanche irradie les décombres. L’accumulation des dessins crée l’œuvre, comme le déséquilibre crée la marche.
On peut se demander : quel était le danger, pourquoi cela menace-t-il de s’effondrer de nouveau, c’est quoi le péril ? On peut se dire : par quel concours de circonstances, jusqu’où ça va… comment ça tient encore ?
Les installations et les dessins d’Olivier Nottellet attestent d’un ordre instable. C’est leur côté grande leçon. On reste interdits, témoins d’une fable où tous sont frappés, les hommes, les animaux, les objets. On rit de leurs tourments – la mécanique burlesque fonctionne à plein. On s’interroge quant à leur opiniâtreté. Pourquoi ces êtres se malmènent-ils de la sorte ? Pour de rire ?
Parfois, il est question du travail, du monde du travail, de son organisation. Il est aussi question de justice, de tribunal populaire, de visite médicale, de mise au placard, d’écart de salaire, de frustration, d’arbitraire. Cela nous concerne. On ne veut pas l’admettre.
Vincent Brocvielle
Silviana Reggiardo
Le travail de Silvana Reggiardo se développe autour de l’expérience urbaine ; elle explore plus particulièrement les motifs du modernisme architectural – la transparence, la théâtralisation des espaces, la vitrine, le rapport du corps à l’architecture.
Sa relation à la photographie relève d’une expérience: expérience de la marche, expérience de l’espace, expérience visuelle, expérience instrumentée. Sans chercher à documenter le réel, elle appréhende l’outil photographique avant tout comme un objet de vision plutôt que comme un instrument de captation
Elle peut adopter tout à la fois la forme distanciée du style documentaire et pratiquer l’extrême rapprochement en abolissant la distance grâce au téléobjectif. Elle constitue des séries sans chercher à dégager des typologies. Elle joue sur les oppositions opacité/transparence, intérieurs/extérieur, espace public/espace privé, tout en s’appuyant sur les propriétés des matériaux de l’architecture moderniste – le miroir, le miroir sans tain, la vitre et l’acier. L’acte photographique lui permet d’accéder à la dimension optique des espaces urbains.
Informations pratiques :
Horaires :
Ouvertures de 15 heures à 19 heures et sur rendez-vous.
Tarif :
Entrée libre