Benoit Labourdette se situe dans le champ du cinéma.
Il a entrepris un travail atypique de réalisation numérique depuis le début des années 2000.
Ce n’est que depuis très récemment (2012), que son travail est diffusé dans des manifestations d’art contemporain.
C’est en cette qualité de « jeune artiste » que la Véranda accueille la première exposition personnelle de Benoît Labourdette.
Aux limites du cinéma expérimental, son œuvre est libre. Il réalise ses films avec très peu de moyens, grâce à une petite caméra qui ne le quitte jamais, Benoît filme comme il prendrait des notes dans un carnet. Son travail de création audiovisuelle se divise en 3 champs :
FILM : films à regarder dans les conditions classiques d’un spectateur de cinéma.
ART VIDEO : vidéos qui doivent être diffusée hors de la salle de cinématographique, en boucle.
INSTALLATION : les dispositifs permettant la diffusion d’objets audiovisuels hors écran classique.
« LE BAISER 1234567 », le FILM, est une œuvre qui m’a amené à une compréhension globale du travail de l’artiste, car elle synthétise pour moi l’ensemble de ses expérimentations.
Dans celle-ci, on peut voir à l’image une longue exploration d’un complexe système de câblage d’une console de mixage son. Sur chacun des câbles est inscrit au feutre les chiffres 1, 2, 3, 4, 5, 6 et 7.
En parallèle, le son nous donne à entendre le récit de l’histoire d’une famille baignant dans un climat incestuel. Les noms des membres de la famille ont été remplacés par les chiffres 1 à 7.
Un rapport intense se créé alors entre l’image et le son, d’autant plus que l’un des chiffres n’est pas à la bonne place… Chez Benoît Labourdette, l’image n’illustre jamais l’histoire, il instaure un rapport de confrontation permanent entre le son et l’image.
Ces chocs engendrent différents effets et sens, soit dans l’instauration d’un climat particulier ou l’accentuation de certains points de l’intrigue, ou l’émergence d’un discours parallèle. Benoît Labourdette joue avec les règles de construction du récit cinématographique et en repousse les limites. Ce jeu l’a emmené d’une part vers la production de films singuliers à la frontière de l’expérimental. Les œuvres classées dans la VIDEO D’ART ou l’INSTALLATION s’appuient également sur ces principes.
La recherche audiovisuelle de l’artiste aborde, également, le thème de la dé-sociabilisation dans le groupe ou dans les lieux publics : l’école, le métro, etc. Il explore la détresse de l’être humain à être en interaction avec ses semblables. Plusieurs dispositifs de réalisation sont utilisés à cet effet, comme la systématisation de l’absence des protagonistes.
Dans « LE BAISER 1234567 », les personnages de l’histoire n’interviennent jamais directement, ils n’apparaissent pas à l’image et leurs interventions sonores se font à travers un narrateur omniscient. Les protagonistes sont également absents dans ses VIDEOS D’ART et INSTALLATION.
Les lieux sont parfois ôtés de toute vie humaine, quand ce ne sont pas les figurants qui apparaissant floutés à l’écran perdent leur identité. Dans la série « ARCHITECTURE », l’artiste s’attache à tordre, plier et multiplier l’image des bâtiments et lieux de vie, ce processus s’attache également à contraindre les silhouettes* dans leur milieu.
Benoît Labourdette laisse apparaître quelques acteurs dans ses œuvres récentes. Mais, là encore, il utilise des procédés de mise à distance, comme la captation au moyen d’un drone, l’être humain devenant alors un insecte ou une chose, qu’un être omniscient contemplerait de haut.
*silhouette: une silhouette dans les métiers du cinéma est un terme parfois rencontré pour désigner un tout petit rôle visible par opposition au figurant qui se fond dans le décor.
Sengthe Vanh Bouapha
Informations pratiques
Vernissage le mercredi 18 avril 2014 à 18 heures
Exposition du mercredi 18 avril 2014 de 18h à 23h
au jeudi 19 avril 2014 de 12h à 16 h