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05 Oct 2016 @ 11h00

Conférence de Nicolas Muller

18 Cher

Résident à La Box d'octobre à décembre 2016

Adresse :

7, rue édouard-branly 18006 - Bourges

Plus d'infos

Démarche
Il semble que Nicolas H. Muller commença en cherchant à résoudre le problème que se posent les artistes depuis Giotto : si la peinture est une fenêtre sur le monde, comment suggérer l’espace ? À la Villa Caméline à Nice, il remplaça une vitre brisée par une neuve, encadra l’ancienne et l’accrocha à l’intérieur de la maison (Vue de la fenêtre Nord de la Villa Caméline, 2010).       

Si l’on pense au Grand verre de Duchamp, Muller nous suggère surtout de regarder plus dehors, vers des cieux toujours bleus, comme lors de son DNSEP à la Villa Arson où il invita le jury à déplacer le regard en direction du toit d’un immeuble. Il y avait disposé un socle blanc. Atlas des temps modernes, la forme minimaliste semblait porter la voûte céleste. Il fallait plisser les yeux pour deviner la forme, mais surtout croire l’artiste sur parole qu’il s’agissait là d’une intervention de sa part (Au loin ça fait mal aux yeux, 2010).   

Ce système de croyance est encore à l’œuvre dans les pièces exposées au Salon de Montrouge en 2014, où un tout autre ciel était présenté, matérialisé en un immense tirage photographique d’un bleu dégradé. Le titre nous apprend qu’il s’agissait de celui surplombant le Mont-Blanc des Dames, le 30 mars 2014 précisément. Il était accompagné d’une vidéo d’ascension de plus de trois heures et d’une photographie du sommet placée sous verre, sur lequel un polygone avait été dessiné au feutre. Autant d’indices à déchiffrer, qui annonçaient Olympia, œuvre future dont le titre en appelle tant à la peinture qu’à la mythologie. Ce projet aussi colossal qu’absurde visait à s’octroyer le plus haut sommet d’Europe pour le faire entrer dans une des plus petites galeries au monde (Chez Robert, une maquette de 60 cm sur 60 cm). Faire pénétrer l’environnement directement dans l’espace d’exposition, soit le Mont-Blanc dans le white cube – voilà qui a, comme le dit Muller lui-même, « un arrière-goût d’art conceptuel mal digéré ». L’œuvre quant à elle déborde largement son espace de légitimation – tout en y restant subordonnée.   

Révisant ses classiques, Muller entreprend à la suite de ses études ce qui pourrait s’apparenter au Grand Tour que les Anglais effectuaient au XVIIIe siècle. Comme ses prédécesseurs, il se confronte aux œuvres des plus grands ; comme eux, il en propose des interprétations, mais, élève indocile, il s’applique à faire descendre les modèles de leur piédestal pour les ramener à leur plus simple condition. La Joconde est ainsi réduite à la photographie de son squelette, alors que ses ossements venaient d’être découverts à Florence où l’artiste était professeur [La Joconde (Mona Lisa), 2013] ; Arnold Böcklin et les artistes lui ayant succédé dans son atelier florentin (tels Baselitz ou Richter, rien que cela) s’incarnent dans un monochrome créé grâce aux résidus de peinture, de plâtre et de goudron récupérés dans l’ancien espace de travail, broyés et mêlés à un médium (Un siècle de peinture allemande, 2013) ; Italo Calvino se résume en l’essence produite avec le romarin poussé sur sa tombe (Essence de Calvino, 2013). Finalement, Muller adopte la très classique peinture à l’huile et s’attaque à tous les genres : la marine (Marine, 2012), le paysage [Nocturne (paysage martien), 2014], trouve dans le monochrome le meilleur espace de projection (L’espace, 2014) quand la nature morte n’est autre qu’une série d’huiles naïves d’une même casquette bleue, reproduite par ses étudiants italiens (…Alive, but Kiga is missing, still…, 2012). Pour qui connaît l’artiste, il reconnaîtra aisément le couvre-chef qui le caractérise ; quoi de mieux pour signifier la vanité de celui qui cherche à s’octroyer les cieux ?

Vers des cieux toujours bleus
Portrait d’un artiste attiré par les sommets.
Par Sophie Lapalu

Projet de résidence
Le projet pour la BOX se consacre à la production d’un ensemble de travaux à la cohérence globale : une série de peintures à protocole, une sculpture à laquelle je donne une utilité, des peintures de géométrie dégradée, le tirage d’une série de photographies spontanées et le tirage d’une photographie déformée. Condamnées à devenir les parties d’une installation, chaque pièce conserve malgré tout sa propre autonomie. En continuant parallèlement à étudier les modules d’un espace labyrinthique dans lequel les différentes œuvres viennent s’inscrire, en continuant aussi à développer différentes formes et (ou de) réflexions, je compte aussi élaborer la trame d’un catalogue retraçant le parcours de ce labyrinthe qui s’est construit.

Workshop
Durant les quatre premiers jours du workshop, je demanderai aux étudiants de penser et réaliser un ensemble de quatre travaux. Chaque jour une pièce, s’appuyant sur celle faite la fois précédente. Le cinquième jour sera consacré à la mise en espace des réalisations. Le choix de montrer ou retirer certains éléments, la compréhension de l’instrumentalisation qui s’opère d’une pièce l’autre lors de leur rapprochement en seront les objectifs. Une attention particulière sera portée sur leur gestion de l’espace (quoi où comment pourquoi).