Formes douces, couleurs acidulées, le travail de Mai Tabakian évoque au premier regard un univers enfantin, mais à y regarder de plus près, le doute s’installe.
On perçoit alors le jeu subtil entre attraction et répulsion, une fascination pour le vivant certes mais aussi pour ce moment particulier où la vie va bientôt céder la place à la décomposition, l’angoisse de la fin comme celle d’un éternel recommencement.
« La plupart des œuvres de Mai Tabakian ouvre à une réjouissante pluralité des interprétations, l’artiste entretenant à plaisir les ambiguïtés, tant dans ce qu’il nous est donné à voir qu’à comprendre, lorsque nous en découvrons les titres.
Que dire, par exemple, de ce qui compose son mystérieux Garden Sweet Garden : s’agit-il de fleurs dévorantes, de champignons vénéneux ? De visions hallucinatoires ou de plantes psychotropes susceptibles de les provoquer ? De confiseries géantes dignes de l’imagination de Willy Wonka, le héros du conte de Road Dahl ?
La multiplicité des interprétations possibles, si ce n’est leur duplicité, se rapportant donc à l’intention, à la disposition d’esprit de celui qui regarde, suggère par là-même l’idée freudienne d’une « rencontre inconsciente » entre l’artiste et le regardeur, dont l’œuvre fait médiation, rencontre qui, comme dans la rencontre amoureuse, opérerait en amont de la conscience…
Autrement dit, jouant des écarts entre l’explicite et l’implicite, dans ses entredeux, ses allers retours, ses retournements, ses doutes, ses ellipses, Mai Tabakian s’amuse autant du non-dit que du déclaratif, de la représentation symbolique comme de la métaphore.»
Marie Deparis-Yafil